Comment sortir du racisme ?

Comment sortir du racisme ?

Le racisme est à la fois un préjugé et un cercle vicieux.

L’histoire prouve que le racisme est une invention. Même si c’est une invention de toute évidence collective, il est très facile de la dater. Cette invention apparut en même temps que l’Occident découvrait l’Afrique et entrevoyait le développement d’un nouveau marché, jusque là oriental et limité, celui du sucre, par la culture de la canne.

L’industrie sucrière naissante au 15e siècle nécessitait, pour être rentable, une main-d’oeuvre que seul l’esclavage pouvait fournir.

Pour développer ce marché, les Occidentaux avaient besoin de bonnes raisons pour justifier l’esclavage, une pratique contraire aux principes universalistes du christianisme, religion dominante en Europe.

La couleur de peau des Africains était un prétexte parfait pour tenter de rompre le principe de l’universalisme.

Ainsi le racisme se développe-t-il entre 1440 et 1685 avec une motivation économique évidente.

Certains théoriciens ont accéléré la propagation des théories racistes pour d’autres raisons que l’infériorisation des Africains.

Pour ceux-là, l’utilité du racisme devient non seulement économique mais politique, mystique et religieuse : l’affirmation – évidemment arbitraire – de la supériorité de certains groupes.

Au XXIe siècle, la motivation première – économique – qui a justifié l’infériorisation des Africains est toujours d’actualité, à cette différence près que ce ne sont plus les Africains en tant que main-d’oeuvre qui sont convoités, mais les richesses naturelles de leur continent. En ce sens, le racisme tendrait à prendre une forme beaucoup plus violente qu’aux 15e-17e siècles, puisque, à la limite, la disparition des Africains -comme ce fut le cas pour les Amérindiens aux 15e-16e siècles -serait la meilleure solution.

En ce même XXIe siècle, la motivation seconde -politique, mystique et religieuse- est toujours aussi forte.

La religion chrétienne n’ayant plus aucune fonction de garde-fou en Occident, l’universalisme peut aisément être mis à mal.

Confrontés à cette situation, quelle solution reste-t-il aux Africains et aux Afro-descendants, écrasés par 6 siècles de racisme (avec des victimes qui se comptent en dizaines de millions) marginalisés et appauvris en Occident, maintenus dans l’ignorance et le traumatisme, colonisés sur leur propre continent, placés en tutelle financière, enfin considérés dans les pays européens comme des citoyens entièrement à part ?

Au début du XXe siècle, des idéologues ont proposé comme solution que les victimes s’affirment en tant que groupe humain et revendiquent à ce titre la suprématie. L’idéologie dite de la « négritude » est largement fondée sur ce principe. Les Africains et les Afro-descendants, que l’Occident a désignés comme une « race » afin de les asservir, ont-ils une chance d’échapper au racisme, c’est-à-dire au malheur, en se proclamant eux-mêmes comme une « race » ?

Ce serait oublier que le racisme a été inventé pour inférioriser les Africains. Pour eux, rien de bon ne peut être tiré de ce préjugé.

C’est bien là qu’est le cercle vicieux. La seule solution jusqu’alors proposée par les penseurs « représentatifs » des Africains et des Afro-descendants (ou ceux que l’Occident a désignés comme tels) a été de conseiller aux Africains et aux Afro-descendants d’utiliser le racisme pour leur propre compte au lieu de le combattre.

Le seul résultat visible de ce type de comportement, c’est que le racisme s’en est trouvé conforté et même considérablement renforcé, malgré les découvertes scientifiques qui auraient dû l’anéantir.

Il est malheureusement probable que tant que les Africains et les Afro-descendants s’acharneront à reprendre à leur compte la vision que les Occidentaux leur ont imposée d’eux-mêmes, le racisme proliférera, d’autant mieux que ce seront les victimes qui s’appliqueront elles-mêmes le châtiment, sans que les bourreaux aient seulement besoin d’intervenir.

L’universalisme (à ne pas confondre avec l’assimilationnisme) est au fondement de la pensée occidentale, comme il est au fondement de la pensée africaine. Tout simplement parce qu’il est au fondement de la pensée tout court. Un homme n’est un homme que s’il reconnaît son semblable au-delà des différences.

C’est l’universalisme le panneau de sortie se secours. Les victimes du racisme – les Africains et les Afro-descendants – n’ont guère d’autre solution que de s’y référer en permanence s’ils veulent sortir du cercle vicieux dans lequel on cherche à les enfermer pour les détruire.

« Je suis noir et j’en suis fier », clamait James Brown. Certes. D’aucuns s’en contenteront. Personne ne pourra les empêcher de danser et de chanter en braillant qu’ils sont « noirs ». Mais James Brown se défrisait les cheveux pour ressembler à une caricature grotesque d’Elvis Presley. Et il a fini sa vie en s’en prenant à sa femme et en assaisonnant sa « négritude » à la phéncyclidine (PCP).

La solution n’est pas de dire « Je suis noir » mais de dire tout simplement « Peu importe la couleur de ma peau, je suis un être humain semblable à tous les autres, avec les mêmes droits. Les « races » n’existent pas. Et ceux qui prétendent appartenir à une « race » sont tout simplement des ennemis de l’humanité qui doivent être traités comme tels »

L’efficacité du combat pour l’universalisme, c’est qu’il oblige tous ceux qui utilisent le racisme pour affirmer leur suprématie à se démasquer. Un raciste démasqué, pris à son propre jeu, est un raciste perdu.

Comment sortir du racisme ? En en sortant, justement, au lieu de s’y complaire. Cela suppose beaucoup de courage.

 

 

 

 

Une réaction au sujet de « Comment sortir du racisme ? »

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    Largement devant tous les autres !

    Tout a été dit ici. Tout.

    Je commence à lire de plus en plus de discours semblables venant des Etats-Unis. Les gens commencent à réaliser le piège. Le plus souvent ce sont des personnes d’origine des Antilles (anglophones) et d’Amérique du Sud qui « challengent » cette vision des choses.

    Cela crée des « clashes » avec certains Afro-Américains, qui confondent le rejet de l’idéologie raciste avec ce qu’il appellent le « colorblindness ». Ils pensent que refuser d’accompagner la pensée raciste dans son expression la plus classique (les termes raciaux) signifie ignorer le racisme… car ils pensent que les « races » sont une réalité biologique. Le comportement de nombreux Euro-descendants leur donne malheureusement l’impression qu’ils ont raison… Pour eux, c’est « dans la peau » (dans le cerveau) que les Euro-descendants ont le racisme.

    Certains ont même inventé une théorie de la « glande pinéale » qui seraient calcifiée chez les « Blancs » et en ferait des êtres inférieurs du fait de leur « absence de mélanine » (« non-melanated people »).

    Je lis de plus en plus aussi le terme « leucoderme » (pourtant une création des racistes aussi) de la part de francophones, pour tenter de désigner cette fois-ci clairement biologiquement les « blancs » comme un groupe biologique à part entière.

    Effectivement, c’est un cercle vicieux.

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