Joséphine, responsable du rétablissement de l’esclavage par Napoléon ?
De nombreux Afro-descendants colportent une invention qui a été répandue par Napoléon dans le Mémorial de Sainte-Hélène. Pour se justifier devant l’histoire, à une époque où l’esclavage et la traite étaient attaqués de toutes parts, Napoléon a prétendu qu’il avait rétabli l’esclavage sous la pression des colons esclavagistes et plus particulièrement de sa première épouse, Joséphine, qui l’aurait convaincu sur l’oreiller de revenir au code noir.
L’argument est particulièrement ignoble, car Napoléon était un raciste comme on en voit rarement et se souciait peu de l’opinion des femmes qui n’étaient pour lui que des objets sexuels interchangeables. « Comme les chiens, j’ai mes saisons », avouait-il. Joséphine de Beauharnais, au contraire, ne semble pas avoir été très marquée par le préjugé de couleur. Elle fut habituée dès son enfance à voir des Afro-descendantes proches de son père. Elle fit de même avec les Afro-descendants de la Martinique. Elle eut même une fille d’une de ces unions et, discrètement, elle en prit soin. À la mort de sa mère, Joséphine signa 7 affranchissements.
Même si Joséphine ne fut certainement pas une antiesclavagiste, elle l’était probablement plus que son mari qui ne l’avait épousée – en connaissance de cause – que pour sa fortune essentiellement liée au système esclavagiste.
Napoléon, sans léser son épouse (puisque l’esclavage n’avait pas été pas aboli en Martinique du fait de l’occupation anglaise) aurait pu, en 1802, maintenir le statu quo dans les colonies où l’esclavage avait été aboli. Il n’en fit rien. Ce fut une décision personnelle et absurde dictée par une négrophobie haineuse et la jalousie que lui inspiraient des hommes tels que Toussaint-Louverture ou le général Dumas.
Il est vraiment déplorable que des Afro-descendants, plutôt que d’avoir le courage de dénoncer le crime de Napoléon, colportent les excuses sexistes que Napoléon lui-même a inventées.
2 réactions au sujet de « Joséphine, responsable du rétablissement de l’esclavage par Napoléon ? »
Joséphine, au cœur de l’offre touristique martiniquaise ?
Avec Joséphine, n’y aurait-il pas mieux à faire ?
Le musée Napoléonien à La Havane. Il met en valeur, notamment pour les touristes, la formidable collection (d’armes, de livres, de souvenirs et d’œuvres d’art) évocatrice de Napoléon Bonaparte rassemblée par Julio Lobo Olavarría, un richissime cubain passionné et admirateur de l’empereur. Suite à son exil après la révolution cubaine, sa collection, l’une des plus importantes du monde sur ce personnage, est passée dans… « le patrimoine de la nation cubaine ». Ce musée a aussi accueilli du 7 au 11 juillet 2014 le 12e Congrès Napoléonien. Cherchez l’erreur : le régime castriste intégrant dans le patrimoine de sa nation des objets ayant appartenus à un esclavagiste et co-organisant même un colloque historique sur celui-ci.
Nos idéologues locaux, par ailleurs thuriféraires de ce régime, auraient-ils raté un épisode (ou une leçon ?) lorsqu’il souhaite éradiquer l’image de Joséphine de l’histoire de la Martinique, la rendant responsable du rétablissement de l’esclavage dans les colonies non-occupées par les Anglais en 1802 (c’est-à-dire la Guadeloupe et Saint-Domingue. Occupée en 1794, la Martinique fut rendue à la France au Traité d’Amiens en 1802 et n’a donc pas connu la première abolition de 1794) ? Ne privent-ils pas la Martinique d’un formidable produit d’appel touristique à cause d’un fait, par ailleurs, jusqu’ici non-prouvé historiquement ? Aucun document n’atteste en effet la responsabilité de Joséphine dans le rétablissement de l‘esclavage (en histoire, il en faut 3 dûment authentifiés et le corroborant pour qu’un fait soit avéré). Les pressions des armateurs de Nantes, La Rochelle ou Bordeaux, principaux bénéficiaires du commerce triangulaire et principaux financiers des guerres napoléoniennes, y ont beaucoup plus contribué que les charmes de Joséphine.
Quant à son lieu de naissance : Martinique ou Sainte-Lucie ? C’est une vieille controverse que le livre attendu de l’historienne Suzanne England-Ancey ne va pas, à mon humble avis, contribuer à apaiser. Les documents sur lesquels elle s’appuie (selon l’article de France-Antilles du 24 mai 2014) ayant été depuis longtemps étudiés et critiqués (au sens de la critique historique) par J. Rennard (Rennard J. Mélanges. In: Revue d’histoire des colonies, tome 36, n°127-128, troisième et quatrième trimestres 1949. pp. 331-347). Quoiqu’il en soit, la ferme volonté de l’île voisine de faire fructifier l’idée de cette naissance sur son sol (dans plusieurs de ces prospectus touristiques le fait est signalé) est le signe évident qu’elle veut avoir sa part de Joséphine pour attirer des touristes. Notre voisine n’est d’ailleurs pas la seule à vouloir sa part de Joséphine puisque Noisy-le-Grand, ville natale de son premier époux Alexandre de Beauharnais, ne manque pas d’inscrire sur ses plaquettes touristiques les liens qu’elle entretient avec Joséphine (Cf. http://www.noisylegrand-tourisme.fr/decouvrir-noisy-le-grand/le-patrimoine-noiseen/les-personnalites/josephine-de-beauharnais-1763-1814.html). Enfin, en 2014, à l’occasion du bicentenaire de la mort de Joséphine, le Sénat lui consacra une exposition qui accueillit plus de 200.000 visiteurs au cours des 4 mois que durèrent cette exposition à raison de 20 euros l’entrée. Voilà donc quelques leçons d’exploitation d’une potentialité touristique en direct de la Caraïbe et de l’Hexagone !
Il ne s’agit pas de nier que Joséphine fut esclavagiste. Personne n’est assez bête pour croire ou attester qu’elle n’ait pas été porteuse des représentations, des normes, des valeurs, des idées, des stéréotypes, des préjugés, en un mot des mœurs de la socio-classe au sein de laquelle elle évoluait. Il ne s’agit pas non plus d’en faire l’apologie. Il s’agit en toute liberté, en toute conscience de ce que nous sommes et surtout libérés de tout esclavage (mais mental celui-là) d’utiliser la renommée internationale (voire même mondiale) d’un personnage de l’histoire martiniquaise pour en faire un produit touristique porteur et par là même en profiter pour faire connaître au monde entier d’autres pans de notre histoire, notamment… la période esclavagiste. Et, ce faisant, le rôle joué dans cette histoire par la caste à laquelle appartenait Joséphine… il y a là une dialectique fructueuse à défricher. En un mot d’exploiter TOUTES nos potentialités et atouts pour redorer l’éclat de notre tourisme pour en faire un secteur créateur d’emplois. Dot ka eksplwaté’y ! Mé nou, nou za koupé tèt -li ! Apwézan yo lé dépotjolé’y !
Errement anti-historique, colporté par des esprits sectaires -suivez mon regard- et surtout répétant à l’envi ce qu’ils ont entendu, sans aucune vérification. Il est évidement facile et pratique, dès lors, d’accuser une morte. Napoléon, originaire de Corse, étant lui-même descendant de Maure (il suffit de reprendre son arbre généalogique) donc descendant d’Africains noirs (ne pas oublier la tête de Maure, sur le drapeau corse) était donc moralement très malhonnête en rétablissant l’esclavage dans les territoires sous tutelle française de l’époque. Les lobbys des planteurs étaient suffisamment puissants, par leurs représentants à Paris, pour n’avoir point besoin de faire appel à Joséphine,Mais les planteurs lobbyistes ont eu leur récompense, lors de l’apparition du sucre indigène, c’est à dire fabriqué en France métropolitaine, qui fut encouragé et préféré officiellement, au détriment du sucre des iles. En matière de colonialismes (au pluriel), c’est l’exploitation et le rendement financier qui comptent, le reste n’est que vue de l’esprit. Encore faut-il en avoir !