Tuerie de Charleston

Tuerie de Charleston

« Tuerie de Charleston » : c’est ce qu’a écrit la presse occidentale. C’est bien plutôt un attentat terroriste caractérisé. Dans la soirée du mercredi 17 juin 2015, vers 21 h locales, à Charleston (Caroline du Sud), Dylann Roof, un jeune Euro-Américain de 21 ans, affichant des opinions racistes, suprémacistes et ségrégationnistes sur Facebook et sur un site Web intitulé TheLastRhodesian.com sur lequel il a publié un manifeste juste avant son crime s’est introduit dans une église fréquentée de longue date par la communauté afro-américaine, l’Emanuel African Methodist Episcopal Church, où sont organisées, le mercredi soir, au sous-sol, des séances d’étude de la Bible.

L’église, fleuron d’une communauté fondée par Richard Allen, est emblématique des luttes des Afro-Américains contre l’esclavage et pour l’égalité. Elle n’a donc pas été choisie au hasard.

Créée au début du XIXe siècle par des méthodistes afro-américains, cette église est considérée comme un haut lieu de résistance à l’esclavage. Le bâtiment initial avait de ce fait a été détruit en 1822, pour avoir été au coeur d’une révolte d’esclaves.

Reconstruite après la guerre de Sécession et l’abolition de l’esclavage, l’église de Charleston a notamment accueilli Booker T. Washington, (une personnalité très controversée dans la communauté afro-américaine, car adepte de l’acceptation de la ségrégation), mais aussi Martin Luther King, militant de l’égalité.

Dylann Roof, de toute évidence bien informé du caractère particulièrement symbolique de ce lieu de culte, voulait très certainement exprimer sa nostalgie de l’esclavage et son refus non seulement de l’égalité des droits sans distinction de couleur, mais également de tout compromis avec les Afro-Américains, même les plus modérés.

Après être resté près d’une heure avec le groupe, qui ne se doutait de rien, Roof a sorti une arme – un Glock 45 que son père lui aurait offert pour son 21e anniversaire – et a ouvert le feu, tuant 9 personnes, exclusivement des Afro-Américains. Malgré les supplications de ses victimes, il a pris le temps de recharger 5 fois son arme, ce qui suppose qu’il a tiré une cinquantaine de cartouches.

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Avant de faire feu, Roof s’est écrié :

«Vous violez nos femmes et vous prenez le contrôle de notre pays. Je dois le faire.»

Ce qui ne laisse guère de doutes sur ses motivations qu’il a d’ailleurs précisées après son arrestation : il voulait allumer une guerre des « races ».

Roof a pourtant reconnu que ses hôtes avaient été « tellement gentils » avec lui qu’il avait presque hésité à les tuer.

Parmi les victimes, l’une des personnalités les plus emblématiques de la communauté afro-américaine, le sénateur démocrate siégeant au sénat de Caroline du Sud, Clementa Pinckney, qui était l’un des principaux soutiens de cette communauté à la campagne d’Hillary Clinton. Clementa Pinckney s’était élevé contre le meurtre d’un Afro-Américain, filmé par un témoin, dont s’était rendu coupable un policier de Charleston en avril 2015.

Une 10e personne aurait été épargnée par Roof, afin qu’elle puisse apporter un témoignage susceptible de terroriser la communauté afro-américaine ou d’enflammer sa colère.

Roof a été arrêté jeudi 18 juin en Caroline du Nord. Cette arrestation mérite quelques commentaires : aucun policier afro-américain, un gilet pare-balles et apparemment un minimum d’égards. Voilà qui contraste avec la manière dont sont appréhendés les Afro-Américains (coupables ou innocents).

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Le président Obama a mis en cause la législation sur les armes à feu, qui permet à n’importe qui, dans certains Etats, (et particulièrement ceux du Sud) d’acquérir n’importe quelle arme.

Mais personne dans la presse n’a parlé d’attentat ni de groupe organisé dans cette affaire, ce qui aurait probablement été le cas si un jeune Afro-Américain s’en était pris à des compatriotes euro-américains.

Roof a été présenté comme un « forcené », un déséquilbré isole et atypique, comme il arrive toujours dans ce genre d’affaire.

On pourrait pourtant y voir l’acte d’un fanatique, d’un terroriste radicalisé et s’interroger sur la résurgence du Ku Klux Klan une organisation terroriste officiellement disparue depuis 1944.

Les violentes racistes sont en effet coutumières en Caroline du Sud, particulièrement chez les policiers. Ainsi, en septembre 2014, un jeune Afro-Américain avait-il été criblé de balles dans une station-service pour n’avoir pas bouclé sa ceinture. La scène avait été filmée.

Outre les violences policières racistes, 27 attentats émanant de groupes terroristes identitaires américains ont coûté la vie à 168 personnes entre 1995 et 2015.

La violence raciste et négrophobe, exprimée sporadiquement, mais régulièrement aux Etats-Unis par des individus ou par des groupes, surtout dans les Etats du Sud, où subsistent des nostalgiques de l’esclavage, de l’apartheid et du lynchage, ne saurait faire oublier la violence sournoise et hypocrite inscrite qui sévit de manière institutionnelle au coeur de la culture européenne, et en particulier de la culture française, d’autant plus dangereuse qu’elle fait l’objet d’un déni systématique de la part de ce qu’il est convenu d’appeler les « élites ».

 

 

2 réactions au sujet de « Tuerie de Charleston »

  1. Ces petits blancs aigris, frustrés, complexés et animés d’une haine congénitale sont un des indicateurs principaux de la problématique barbare et féroce du suprémacisme blanc.

    Le refus de reconnaître que le suprémacisme blanc est institutionnellement organisé en Occident et sur la planète en système de domination impérialiste et colonial dont l’essentiel de la force repose sur l’inféodation des pays du Sud et le méga-crime multiséculaire contre l’Afrique, les Africains et les descendants d’Africains déportés, est la grande faute de la majorité silencieuse et la grande erreur des progressistes occidentaux.

    Oui, ce système de suprémacisme occidental autour de la notion de race blanche c’est bien la blanchitude ! Et c’est elle qui régit les rapports d’un Occident minoritaire avec le reste du monde.

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